Les truites sont de mieux en mieux éduquées.
Toutes les « vieilles mains » qui fréquentent les mêmes rivières, depuis parfois de nombreuses années, vous le diront.
Les truites sont de plus en plus difficiles à prendre car elles gardent en mémoire les mouches artificielles qui les ont leurrées.
Ainsi, une truite prise une fois à la mouche sera beaucoup plus vigilante, bien plus sélective, par rapport à tous les leurres proposés ultérieurement par les moucheurs.
Bien entendu, ce principe ne prévaut que dans la mesure où elle a été remise à l’eau avec d’infinies précautions.
Je fais référence ici aux moucheurs, qui pratiquent assidûment le « Cash and release » ou, en français, « Apprendre à prendre, apprendre à relâcher ».
C’est aussi pour cette raison que de nombreux pêcheurs pensent, souvent à tort, qu’il y a beaucoup moins de poissons dans les rivières.
C’est souvent vrai à cause des pollutions diverses et variées subies par le milieu aquatique (notamment liées à l’activité agricole intensive et ses rejets de pesticides et de nitrates).
Toutefois, cette raréfaction existe dans des proportions nettement inférieures à celles qu’ils imaginent.
Les vrais écologistes:
Ainsi les pêcheurs relâchant les poissons qu’ils capturent sont, à mes yeux, de vrais écologistes au sens noble du terme.
Rien à voir avec les « écologistes de salons » qui parlent beaucoup mais qui n’agissent que très rarement sur le terrain :
- les rivières pêchées très régulièrement à la mouche voient leur densité de poissons augmenter sensiblement
- la taille moyenne des truites de plus en plus difficiles à leurrer augmente également de façon importante
- le nombre de géniteurs progresse et contribue donc à faire croître le renouvellement naturel des cheptels.
Alors, dans ce contexte, comment faire pour continuer à prendre (et à relâcher) des truites de mieux en mieux éduquées ?
Comment choisir dans ses boites, parmi des centaines, voire des milliers (l’énergie créatrice des pêcheurs à la mouche qui pratiquent le Fly Tying est sans limite), LA bonne mouche ou l’artificielle miracle.
Celle qui prendra des poissons de plus en plus méfiants ou considérés comme « imprenables » à cause de ce véritable phénomène d’accoutumance ?
Il existe deux écoles qui « s’affrontent » pour leurrer les truites de mieux en mieux éduquée :
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Les « imitationnistes »:
Ces pêcheurs et monteurs de mouches artificielles souhaitent reproduire les insectes aquatiques le plus parfaitement de possible. Grâce aux plumes, aux poils, aux divers matériaux naturels ou synthétiques qu’ils dressent sur leurs hameçons, ils imitent une catégorie d’insectes naturels et bien évidemment aux différents stades d’évolution de leur cycle de vie.
Bien entendu, ils ont le soucis extrême du détail: la couleur, la taille, la silhouette, les pattes, le thorax, l’abdomen, les cerques …
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Les adeptes des mouches d’ensemble pour leurrer les truites :
Ils n’utilisent que quelques mouches de diverses tailles qui n’ont qu’une vague apparence avec les insectes naturels mais ils les montent avec des matériaux qui « donnent vie » à leurs artificielles. Le CDC est un bon exemple.
Les mouches utilisées sont surtout soignées sur la partie ventrale et non sur la partie dorsale car c’est elle qui est visible des poissons. N’oublions jamais que les truites voient nos mouches du dessous, à travers l’eau.
Le débat est ouvert depuis de nombreuses années et est loin d’être tranché… :-))
Ma vison des choses :
Quant à moi, je me classe clairement dans la deuxième catégorie car je refuse d’avoir sur moi des milliers de mouches artificielles.
Je ne souhaite pas être transformé en une espèce de magasin ambulant d’articles de pêche, de perdre un temps précieux face à des choix cornéliens.
Parce que j’ai quelques modèles fétiches qui ont prouvé leur efficacité sur des rivières différentes dans lesquels je crois.
La confiance dans le matériel utilisé est ici essentielle, comme souvent dans le cadre d’activités sportives.
La solution aux deux questions posées ci-dessus repose, d’après moi, sur la notion d’apparence de vie que nous arrivons à donner à nos mouches.
Une fois mouillées, nos artificielles doivent proposer de la translucidité, une apparence naturelle et vibrionner grâce aux matériaux utilisés pour proposer un simulacre de vie.
Vive les mélanges :
Lors du montage de vos artificielles, je préconise donc de mélanger les matériaux (dubbing naturel et fil de montage, cul de canard et poil de masque de lièvre, fil de cuivre et fourrure,…).
Je vous conseille surtout de créer des mouches qui flottent bas sur la surface de l’eau. Voire juste en dessous de la pellicule, pour imiter le stade de l’émergence des éphémères.
C’est à ce stade que les truites se gavent à bon compte des éphémères pas encore totalement formés au niveau de leurs ailes et en complète mutation.
En sèche, j’utilise donc très souvent, sur les poissons éduqués, des « Oreilles de lièvre », des « Peutes » inventées par Henry BRESSON.
Mais également, des montages parachute, des spinners dépouillés, des mouches en CDC de plus en plus simples, « dévêtues », aérées, voire minimalistes.
La beauté n’est certes pas toujours au rendez-vous mais l’important c’est surtout que ces artificielles obtiennent les suffrages des poissons et non qu’elles flattent mes yeux !
Eric Le Rest.
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